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Musée national du Qatar : comment travailler l’image pour un musée immersif gigantesque ?
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Alexandre Michelin : Je trouve que cette histoire est intéressante, parce qu’elle montre que, contrairement à ce qu’on dit, il y a une continuité, il y a des talents, il y a des savoir-faire. 

Toi, tu es un producteur de cinéma, j’allais dire classique. Toi, tu es un réalisateur avec tout ce que ça comporte, notamment en France, l’écriture, le pouvoir créatif. 

Et puis vous vous retrouvez autour de ce projet incroyable qui est le projet, finalement, de Jean Nouvel qui crée un musée pour le Qatar.

Et finalement, dans ce musée qui est extraordinaire, je ne sais pas si vous voyez à quoi ressemble ce musée, c’est le musée avec… qui est dans le désert…

Naoufel Ben Youssef : Une rose des sables. 

Alexandre Michelin : Tu peux peut-être nous dire un peu. Comment ça se passe ? C’est le Qatar Institute qui vous appelle ?

Naoufel Ben Youssef : Tout à fait, et qui cherche à travers le monde des réalisateurs pour réaliser des films comme contenu de ce musée et à partir de cette architecture vraiment monumentale.

Alexandre Michelin : Les murs font quelle hauteur ?

Naoufel Ben Youssef : Alors, il n’y a aucun mur qui soit égal à l’autre, puisque c’est une rose des sables et on est à l’intérieur de cette rose des sables. 

On a des murs concaves, convexes, arrondis, complètement à l’oblique… chaque galerie est unique, et donc il faut penser le format qui sera distribué totalement différemment. 

Alexandre Michelin : Christophe, toi, tu es réalisateur, tu tombes de ta chaise ? Tu dis : “qu’est-ce que c’est que cette histoire ?”

Christophe Cheysson : Alors c’était doublement intéressant, parce que le Qatar est un pays émergent qui, il y a encore 30 ans, était une série de tas de sable, et c’est un peuple qui cherche sa destination, qui cherche son histoire, qui cherche à poser les jalons de sa future civilisation. 

Et quand le musée a été mis en chantier, je pense que la question de ce qui allait y avoir à l’intérieur n’avait pas été clairement posée.

Le bâtiment, par exemple, remplaçait un petit palais dans lequel il y avait l’ancien musée national, et ce musée national faisait peut-être trois étages de 50 mètres carrés chacun. 

Alexandre Michelin : Et là, on change de dimension, Jean Nouvel fait une œuvre avec cette fameuse rose des sables ?

Christophe Cheysson : Et là, tout d’un coup, on a un bâtiment qui fait presque un kilomètre et demi de galeries, considérablement grand.

Et donc s’est posée la question du contenu. Et, à un moment, c’est une des réponses qui a été apportée, c’était : “puisqu’aujourd’hui, on ne sait pas exactement ce qu’on va mettre dans le musée, la solution, ça va être de faire des films, on va mettre des films sur tous les murs qui parleront de la culture du Qatar. “

Très vite, une espèce de scénario et de narration ont été posés, et donc on est allés chercher des cinéastes un peu partout sur la planète pour réaliser ces films.

Alexandre Michelin : Donc Jacques Perrin, notamment ?

Christophe Cheysson : Jacques Perrin, entre autres réalisateurs, Abderrahmane Sissako, Mira Nair… 

Alexandre Michelin : Donc des grands noms, dont le tien. 

Christophe Cheysson : On verra.

Alexandre Michelin : Et toi, en tant que producteur, tu te retrouves dans cette situation incroyable, où il y a des murs pas possible. Ce ne sont plus des écrans. 

Et comment vous réagissez collectivement, face à ce défi ? 

Naoufel Ben Youssef : C’est une page blanche, on avance jour après jour et c’est effectivement une grosse partie de recherche et développement. On fait des essais, on avance des hypothèses, des intuitions…

Et puis c’est vrai qu’on a eu la chance de travailler sur un temps long. 

Alexandre Michelin : Ça a duré combien de temps ce projet ? 

Christophe Cheysson : C’est pas très symptomatique, malheureusement. 

Moi j’ai commencé à travailler sur le projet en 2011, mais sur des ébauches de films qui se sont avérés complètement impossibles à mettre en œuvre, et à une époque aussi où le Qatar cherchait son identité, et il a fallu un peu de temps pour que cette digestion et cet accouchement se passent.

On a réellement commencé à travailler en 2016-2017.

Alexandre Michelin : Donc cinq ans ?

Christophe Cheysson : Oui, oui.

Naoufel Ben Youssef : Et puis chaque projet est distinct, puisque là, en l’occurrence, une des galeries que Christophe a réalisée, c’était un film naturaliste et donc, effectivement, on est sur plusieurs saisons, plusieurs espèces, on recense l’ensemble de la faune et de la flore du Qatar, donc chaque espèce est distincte et a un protocole de tournage distinct. 

Donc effectivement, on a tourné plus d’un an, en termes de tournage. 

Christophe Cheysson : On a apporté un petit teaser, qui donne une idée de ce à quoi ressemble le musée.

Le mieux, c’est peut être d’y jeter un œil. 

Alexandre Michelin : Si vous avez des commentaires à faire… 

Donc c’est un musée ultramoderne, on reconnaît la patte de Jean Nouvel.

Voilà le gigantisme du musée.

Christophe Cheysson : 11 galeries. La galerie où nous avons tourné a un écran principal qui fait presque 50 mètres, sur des hauteurs qui vont de 11 à 17 mètres de haut, donc on est devant des écrans où la notion de cinéma devenait complètement caduque, parce que :

1) le spectateur était souvent trop près de l’écran pour être capable d’absorber du mouvement et appréhender une image dans son entièreté.

2) contrairement à une salle de cinéma où le spectateur est assis, on ne sait pas ce que le spectateur regarde, et comme il y a des écrans partout, la question de la narration se pose vraiment, comment est-ce qu’on donne une histoire en étant certain que le spectateur va avoir les éléments qui lui permettent de la comprendre.

Présentateurs : 

– Alexandre Michelin (Fondateur KIF Festival)

– Clara-Doïna Schmelck (philosophe, journaliste, chargée de cours Sciences Po Strasbourg)

Intervenants :

– Naoufel Ben Youssef (CEO Les Films en Tête)

– Christophe Cheysson (Réalisateur)

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