Public : Ma question est : quel est votre point de vue, quel est votre avis sur le fait que la Chine tend à brider aujourd’hui l’accès au numérique auprès des enfants ? L’accès au numérique au sens large, c’est-à-dire réseaux sociaux, jeux vidéo… je crois qu’ils parlent d’une heure par jour uniquement.
Olivier Dauba : Plutôt trois. Trois sur le jeu onligne.
Effectivement, c’est quelque chose qu’on suit de près. C’est intéressant d’avoir des points de vue chinois sur la question, justement.
On parlait des usages, justement, donc c’est bien aussi de se mettre à la place des Chinois et de pourquoi ils prennent ce genre de décision.
Et on a des retours d’information vraiment intéressants, qui ne sont pas forcément les messages qui circulent en Occident, par ailleurs.
On l’a vu notamment par rapport à tout ce qui était éducation online en Chine. Le crack down, on va dire, de **cégépien**, a commencé par, d’abord, les boites qui bossent sur les équivalents du **démit/UDEMI** en Chine.
Et la raison que vous donneront des Chinois, si vous les interrogez là-dessus, c’est que pour eux, c’est s’attaquer à un levier inégalitaire.
Les enfants chinois, à cause de la démographie, ont une pression sur les épaules incroyable. A cause de la politique de l’enfant unique en Chine, on a des enfants qui doivent subvenir aux besoins de leurs deux parents, des petits-enfants qui doivent subvenir aux besoins de leurs deux parents, leurs quatre grands-parents.
Donc on place, à cause de cette politique qui a existé, les enfants chinois dans un modèle ultra compétitif, où on leur met une pression de dingue pour qu’ils sur-performent à l’école, pour qu’ils aient des carrières hyper lucratives.
Et on leur fait du mal, en faisant ça. Et quand vous interrogez les Chinois, ils vous disent : “la raison pour laquelle on fait ça, c’est ça. C’est pour arrêter cette course, cette pression de dingue qu’on met à nos gamins.”
Donc c’est intéressant de le voir sous cet angle-là. De se dire non, on veut remettre un petit peu les cartes à plat, pour arrêter aussi toutes les dérives financières qui pouvaient être engagées autour de ces choses-là, de se dire “je vais investir énormément pour, aussi, en tant que parent, mettre une pression de dingue à mon gamin.”
Donc, oui, il y a une vraie question sur la compréhension de ces usages-là. Et quand on prend les acteurs du jeu vidéo chinois, si vous regardez le type de produit sur lesquels ils travaillent, ils ont été aussi vers des types de jeux avec une monétisation intégrée hyper forte, hyper agressive.
Donc pour certains acteurs de ces marchés sud-asiatiques, vous avez des gens qui vont désigner des jeux, justement, dans lequel on doit faire pondre régulièrement de l’argent à l’utilisateur.
Le système des **gatcha**, ça a vraiment été poussé au départ par là-bas. Et, là aussi, on a une dérive qui impacte les ménages au quotidien. Donc le crackdown de **CGPic** vise aussi à mettre un frein à ces choses-là.
Donc il y a plein de paramètres qu’on ne voit pas forcément en Occident. C’est le jeu vidéo, mais aussi plein de pratiques associées au jeu vidéo : la monétisation autour du jeu vidéo, la pression qui peut être liée à l’utilisation du temps que je laisse à mes enfants… Voilà, c’est tous ces paramètres qui amènent à ce genre de décision.
Je vous dirais : on est créateurs, on est aussi parents nous-mêmes, aussi, au quotidien.
Donc voilà, on parlait de quête du sens et de responsabilités, mais oui, voilà, vous aurez peut-être des cultures d’entreprise différentes d’une boîte à l’autre, tous les gens ne seront peut-être pas complètement alignés, mais comme dans n’importe quel type de business, vous avez des acteurs qui sont peut-être plus ou moins bien intentionnés.
Présentateur : Jean-Marc Merriaux (Inspecteur Général de l’Éducation, des Sports et de la Recherche)
Intervenant : Olivier Dauba (VP Fun Learning Ubisoft)